Les habitants de l’îlot Lombardie et alentours louchent sur la bande de terre longeant le tram et la piste cyclable. Ils veulent y créer un jardin partagé. Premiers coups de bêche attendus en janvier, d'ici là il faudra déterminer le fonctionnement du potager collectif. Une question épineuse.
« Dix ares ! On va en manger des tomates !», s’exclame Claire à l’annonce de la superficie du futur jardin partagé de l’îlot Lombardie, un jardin créé et cultivé collectivement par des habitants. Les nouveaux occupants de l’immeuble en autopromotion Eco-logis sont à l'initiative du projet. Aujourd'hui ils essaient de fédérer le quartier autour de la création du potager. Déjà deux réunions de travail ont été organisées au rez-de-jardin de l'immeuble écolo rue de Lunéville. Ils sont une quinzaine, venus des étages supérieurs ou des pâtés de maisons alentours. Ce qui les botte ? Le « retour à la terre», « apprendre à jardiner », « créer un lieu de rencontre », « manger ce qu'on produit » et le tout à « deux pas de chez soi ». La Ville n’a pas hésité à les soutenir dès le début. « Ils ont déjà prouvé qu’ils étaient tenaces : dix ans de travail ensemble pour que leur immeuble voie le jour », explique Alain Diedrichs, responsable adjoint du service espaces verts de la Ville.
Carottes, navets et tomates pourraient border l'allée du Schluthfeld en plein cœur de l'îlot Lombardie. |
Mais si l’idée est simple, la conception ne va pas sans soulever quelques questions. Au premier rang desquelles : la clôture. La Ville permet à des associations de jouir de l’espace public à condition qu’il reste « ouvert ». Oui, mais il ne s’agit pas de le confondre avec un garde-manger en libre-service. Et il faudra bien signifier aux propriétaires de chiens que dans ce lieu couru pour les promenades poussent désormais des légumes… que l’on consomme. Médor sera prié d’aller se dégourdir les pattes ailleurs.
Deuxième condition fixée par la Ville : «un principe de non exclusion a priori. Tout le monde doit pouvoir participer… dans la limite des capacités d’accueil », nuance Alain Diedrichs. Car si le jardin est accessible à tous les jardiniers volontaires, il n'en est pas pour autant extensible.
La Ville prête non seulement le terrain mais finance aussi les travaux de mise en service du jardin : création du point d’eau, retournement de la terre, construction du cabanon, des allées…
En contrepartie, le jardin doit être un « outil d’animation du quartier »*.
Autour de la table on s'interroge : faut-il opter pour des plates-bandes individuelles ou cultiver tous ensemble la même surface ? Dans le premier cas, l’accueil de nouveaux participants risque de se traduire soit par une inscription sur liste d’attente, soit par la subdivision en parcelles de plus en plus petites. Mais la gestion entièrement communautaire n’en est pas moins complexe. « Il faut être très bien organisé en amont, savoir ce que chacun sème et où, connaître l’avancement des cultures… » explique au groupe Joëlle Quintin, salariée d’Eco-conseil, une association assistant la ville en maîtrise d’ouvrage.
A l’îlot Lombardie, pour satisfaire à ces exigences contradictoires, on songe à des solutions intermédiaires. Une enceinte basse, végétalisée ou faite de roues de vélo, permettrait d’avoir la clôture sans l’idée d’espace clos. L’espace pourrait aussi être partagé entre une partie collective et des parcelles individuelles. « Chaque jardin est une histoire unique, le fonctionnement est à imaginer », poursuit Joëlle Quintin. Ils ont encore du pain sur la planche avant les premiers semis.
Noémie Rousseau
*Il existe déjà quatre jardins partagés à Strasbourg, deux à Hautepierre, un à la Krutenau et au Port-du-Rhin. Pour l’heure, la Ville demande un simple rapport annuel aux associations mais elle réfléchit à d'autres moyens de contrôler cette activité en plein essor.
A Noter : Réunion publique d’information le 23 novembre au centre socioculturel de Neudorf. Au programme : exposition, projection, témoignages.
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